1ère analyse gratuite

Nouvelle victoire pour les droits des victimes

Par deux décisions en date du 25 mars 2022, la Cour de cassation réunie en Chambre mixte est venue affirmer de manière claire et précise l’existence et l’autonomie de deux préjudices au profit des victimes (Pourvois n° 20-17.072 et 20-15.624)

Tout d’abord, la Cour de cassation s’est prononcée sur l’existence du préjudice d’angoisse de mort imminente devant être nécessairement distingué des souffrances endurées. (Ch. mixte, 25 mars 2022, n°20-15.624)

Préjudice d’angoisse de mort imminente : Il est nécessaire de démontrer l’état de conscience de la victime en se fondant sur les circonstances de son décès

Une fois n’est pas coutume, le FGTI faisait valoir que ce poste de préjudice était nécessairement évalué dans le cadre des souffrances endurées et que par voie de conséquence, procéder à une indemnisation autonome conduirait à une double indemnisation.

Ce raisonnement ayant été rejeté par la Cour d’appel de Papeete, le FGTI avait introduit un pourvoi notamment sur ce point.

La Haute juridiction a rejeté le moyen en soulignant que « pour caractériser l’existence d’un préjudice distinct « d’angoisse de mort imminente », il est nécessaire de démontrer l’état de conscience de la victime en se fondant sur les circonstances de son décès « .

Dès lors, le fait pour une victime d’avoir la conscience de sa mort imminente, du fait de la dégradation progressive et inéluctable de ses fonctions vitales causée par une hémorragie interne et externe massive, subissait nécessairement un préjudice spécifique pouvant donner lieu à indemnisation.

Dans une seconde espèce, la Cour de Cassation a reconnu l’existence d’un préjudice d’attente et d’inquiétude pour les proches de victimes. (Ch mixte, 25 mars 2022, n°20-17.072)

Préjudice d’attente et d’inquiétude : un préjudice spécifique qui ouvre droit à indemnisation lorsque la victime directe a subi une atteinte grave ou est décédée des suites de cet événement

Pour la Haute Juridiction « La souffrance, qui survient antérieurement à la connaissance de la situation réelle de la personne exposée au péril et qui naît de l’attente et de l’incertitude, est en soi constitutive d’un préjudice directement lié aux circonstances contemporaines de l’événement.

Ce préjudice, qui se réalise ainsi entre la découverte de l’événement par les proches et leur connaissance de son issue pour la personne exposée au péril, est, par sa nature et son intensité, un préjudice spécifique qui ouvre droit à indemnisation lorsque la victime directe a subi une atteinte grave ou est décédée des suites de cet événement.« 

Elle en conclut que « e préjudice d’attente et d’inquiétude que subissent les victimes par ricochet ne se confond pas, ainsi que le retient exactement la cour d’appel, avec le préjudice d’affection, et ne se rattache à aucun autre poste de préjudice indemnisant ces victimes, mais constitue un préjudice spécifique qui est réparé de façon autonome« 

Ces deux décisions sont une avancée majeure pour les droits des victimes, ce qui doit être salué, et pourront être opposées aux payeurs dès à présent dans le cadre des procédures d’indemnisation.